A Dieu cher François !

Le 30 avril, jour où la Légion étrangère fête Camerone, Bruno Dary qui la commanda m’apprit le rappel
à Dieu de son frère François. Comme il l’a dit, “la fraternité des armes rejoignait ainsi la fraternité des âmes”. Le Secours de France venait de perdre l’un de ses fidèles administrateurs.

 

Je l’avais rencontré lors de l’un des premiers Camps Saint Louis où une jeunesse avide de servir au mieux sa patrie venait, pendant l’été, se former à la lumière de la doctrine sociale chrétienne, de l’histoire et de la culture de la France, de ses héros et de ses saints. Nous ne nous sommes plus quittés ; il fut de tous nos combats car, comme l’a exprimé le Général Dary, “s’il n’était pas militaire, il fut un soldat. Et mieux que cela, il avait vraiment une âme de soldat”.

En mai 1968, il contribua à faire échapper la Faculté de Droit de Paris à la “chienlit” qui envahissait l’Université.

Lorsqu’en 1975 apparurent des “comités de soldats” réclamant des “sections syndicales” dans l’Armée et dénonçant le “dressage phallocratique sévissant dans les casernes”, il créa, peu de temps après avoir achevé son service militaire au 9ème R.C.P., l’Association des Jeunes Officiers de Réserve pour faire entendre une autre voix dans les médias. Cela nous valut d’être reçus par le Général Bigeard qui avait été nommé Secrétaire d’état à la Défense pour y remettre de l’ordre.

Quand en 2001 Michel De Jaeghère, Vincent Trémolet et Christian Brosio conçurent Le livre blanc de l’Armée française en Algérie, il eut l’idée d’en faire signer la préface par des officiers généraux ayant servi en Algérie. Un nombre considérable d’entre eux, 521, acceptèrent, faisant de la sortie de ce livre un “événement” : le jour de sa présentation à la presse, Le Figaro en fit sa “une” et quelque temps plus tard Le Monde se sentit obligé d’y consacrer un long article pour expliquer… que ce n’était pas vraiment un “livre blanc” !

J’ajouterai qu’il fut pendant 9 ans président de l’association Clarifier créée pour faire connaître aux Français, qui trop souvent l’ignorent, ce qu’est réellement l’islam, grâce aux travaux d’Annie Laurent, exposer les moyens de faire face aux défis qu’il pose à notre civilisation comme aux musulmans désireux de vivre paisiblement leur foi en France, et faciliter l’accueil de ceux d’entre eux attirés par le Christ. Il aura eu la joie de connaître le rapprochement de Clarifier et d’autres associations travaillant dans le même esprit au sein de “Mission Ismérie”.

Soldat, il le fut aussi dans sa vie professionnelle. Après une brillante carrière en entreprise, dans les ressources humaines puis comme DGA d’Ergam Ronéo, il dirigea le Centre d’Etudes des Entreprises avant de créer avec notre ami commun Bernard Ousset (le fils aîné du fondateur de la Cité catholique auquel nous devons tant) le cabinet de conseil Quorum. C’est à lui que j’ai fait appel lorsqu’à Casablanca je dirigeais Lafarge Maroc. Durant plusieurs années il m’aida à faire de cette entreprise née de la fusion de quatre sociétés hétéroclites, l’une des meilleures filiales – techniquement, humainement, financièrement – du groupe Lafarge. Les témoignages reçus de mes anciens collaborateurs marocains – et donc musulmans – que j’avais informés de son décès disent ce qu’il était et ce que fut son rayonnement. En voici deux :

François nous a accompagnés des années durant et nous avons tous progressé grâce à lui : il était bien plus qu’un consultant… Nous prions pour que son âme repose en paix.

C’était un ami loyal, un compagnon attentif, habile et bienveillant pour nous permettre d’asseoir un management humain et efficace chez Lafarge Maroc… Veuillez présenter mes condoléances à sa famille et tout particulièrement au Général Dary qui m’avait fait l’honneur de m’inviter à une soirée inoubliable à la Légion étrangère.” (François avait eu l’idée de réunir cadres d’entreprise et officiers de la Légion sur les thèmes de la cohésion et du commandement des hommes).

Soldat, il le fut enfin face à la maladie incurable qui le paralysa progressivement, tout en laissant intacte sa lucidité. Habité par une foi intense, nourrie au sein du “Chemin néocathécuménal”, et admirablement soutenu par son épouse Roselyne, il s’est préparé à sa rencontre avec Dieu, sans jamais se plaindre. Il a pu se dire, comme Saint Paul : “Le moment de mon départ est venu. J’ai combattu jusqu’au bout le bon combat, j’ai achevé ma course, j’ai gardé la foi.”

Il a rendu son âme à Dieu à l’hôpital Percy, quelques jours après y avoir été admis, en ayant eu le réconfort, grâce à un jeune aumônier militaire, de revoir sa femme, ses enfants et petits-enfants.

Ses obsèques, empreintes d’une Espérance surnaturelle, reflétèrent sa dernière consigne : “Ne soyez pas tristes, je vais entrer dans la Vie.

Nul doute qu’il y continuera le travail du soldat qu’il fut.

Jean-Marie Schmitz

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